Collective rights - peasants

Les droits collectifs font partie intégrante de la protection de la biodiversité et des forêts. Qu’entendons-nous par ce terme et comment pouvons-nous en faire une réalité ?

Les droits collectifs sont des droits humains qui protègent les communautés et l’environnement

Les droits collectifs (aussi appelés « droits de solidarité ») – dans le cadre du droit international – sont apparus parce que les droits humains individuels ne protègent pas suffisamment les peuples vivant en collectivité, en particulier les peuples autochtones, les communautés locales et les autres minorités. 

Les droits collectifs font partie des droits humains, dont les définitions et les classifications sont en constante évolution. Après les droits civils et politiques (droits de première génération), les droits sociaux, économiques et culturels (droits de deuxième génération), les droits collectifs font partie de la troisième génération ou « droits de solidarité ». Ils sont donc universels, indivisibles et interdépendants. 

Les droits collectifs sont en outre fondés sur la culture, les traditions et les pratiques collectives des peuples autochtones et des communautés locales (IPLC indigenous peoples and local communities) ; ils sont donc historiques et ne constituent pas un droit de propriété. Cela signifie, par exemple, que les connaissances traditionnelles n’appartiennent pas à un individu donné puisqu’elles sont détenues collectivement. Ces droits sont intrinsèques aux peuples autochtones et aux communautés locales et existent donc au-delà de toute reconnaissance par l’État.

Les droits collectifs sont le fondement de la justice et de l’équité ; ils  profitent non seulement aux communautés, mais également à la société dans son ensemble. Ils constituent une étape nécessaire sur la voie d’un changement de système dont nous avons désespérément besoin.

Défenseurs, femmes et forêts

What are collective rights indigenous people

Si les droits sont inscrits dans la loi, c’est grâce aux communautés qui ont, historiquement, résisté aux violations et revendiqué leurs droits. Ces groupes sont confrontés à des menaces quotidiennes. Or la conservation et l’utilisation durable de la diversité biologique font partie intégrante des modes de vie traditionnels de ces groupes, notamment des communautés autochtones et noires, des agriculteurs et des populations locales. La déforestation ne détruit pas seulement les forêts et la biodiversité, elle est souvent liée à des atteintes à l’intégrité physique et psychologique de ceux qui défendent les territoires.

La protection des droits collectifs garantit la préservation des identités culturelles, des formes particulières d’organisation et du patrimoine territorial de ces communautés. Elles peuvent ainsi continuer à pratiquer la gestion communautaire des forêts, l’agroécologie et d’autres pratiques traditionnelles, qui contribuent toutes à la durabilité globale. 

En Malaisie, les peuples autochtones du Sarawak luttent quotidiennement contre la déforestation et l’accaparement des terres. À Marudi, plus de 20 villages ont été menacés par des plantations de palmiers à huile en 2018. En collaboration avec SAM/Les Amis de la Terre Malaisie, les communautés ont pris conscience de leurs droits, cartographié leurs territoires et formé une association de résidents. Elles ont ensuite pu obtenir une copie de la licence accordée au projet, révélant le nom de l’entreprise responsable. À l’aide des cartes qu’elles ont dressées et qui délimitent leurs territoires, elles ont réussi à contraindre l’entreprise à s’engager à ne pas empiéter sur leurs terres et à ne pas mener d’activités d’arpentage sur ces terres. Cette mise en œuvre pratique des droits a permis à la communauté de continuer à utiliser ses connaissances et pratiques ancestrales pour protéger ses terres et la biodiversité qu’elles hébergent. 

La mise en œuvre réussie des droits collectifs à l’échelle mondiale profitera également à la biodiversité et à la conservation des forêts. 

Selon une étude publiée par la FAO en 2021 : « Entre 2003 et 2016, le carbone capturé par les territoires autochtones du bassin amazonien équivaut à 90 % de tout le carbone émis par ces territoires en raison de la déforestation ou de la dégradation des forêts (Walker et al., 2020) ».

Ce type d’études montrent que la mise en œuvre de droits collectifs – par exemple l’autonomie décisionnelle et le respect des droits fonciers et territoriaux – permet à la gestion communautaire des forêts de prospérer, tout en réduisant les émissions de carbone. La gestion communautaire des forêts (ndlr: publication non traduite) protège les forêts.

Les droits des femmes font également partie intégrante des droits collectifs et sont essentiels à la gestion communautaire des forêts. Les femmes jouent un rôle central dans l’entretien, la conservation et la défense des forêts et de la biodiversité. Les droits des femmes sont les droits des défenseurs. Dans les deux cas, il s’agit de droits collectifs. Ils sont tous deux essentiels dans la lutte contre la déforestation et la perte de biodiversité. 

Quels sont les instruments juridiques qui protègent actuellement les droits collectifs ? 

Les atteintes aux droits des peuples – en particulier aux droits collectifs – sont nombreuses, qu’il s’agisse de l’impunité des entreprises ou de la montée des fascismes. En réponse, les mouvements de résistance prennent de l’ampleur. La protection de ces droits est plus vitale que jamais. 

Afin de permettre de mieux comprendre comment les droits collectifs sont actuellement protégés, Les Amis de la Terre International ont décomposés en droits collectifs : organisation interne, droits culturels, moyens de subsistance locaux, autodétermination ou autonomie, territoire, bien-être, prise de décision, protection des connaissances traditionnelles. 

Nous avons ensuite identifié 17 instruments juridiques internationaux qui couvrent ces droits. Par exemple, la déclaration des Nations unies de 2007 sur les droits des peuples autochtones et la déclaration historique de 2018 sur les droits des paysans et autres personnes travaillant dans les zones rurales : Déclaration des Nations unies sur les droits des paysans et des autres personnes travaillant dans les zones rurales (UNDROP) – qui sont l’aboutissement de décennies de lutte et de plaidoyer de la part des paysans, menés par La Via Campesina. Plus récemment, le Cadre mondial pour la biodiversité convenu lors de la COP15 de la Convention sur la diversité biologique en décembre 2022, constitue une avancée significative dans la mise en œuvre des droits collectifs. Il demande (ndlr: document non traduit) aux pays de « garantir une représentation et une participation pleines et entières, équitables, inclusives, efficaces et tenant compte des sexospécificités dans la prise de décision », ainsi que de « garantir la pleine protection des défenseurs des droits humains dans le domaine de l’environnement ».  

La simple existence de ces instruments n’est malheureusement pas suffisante. La biodiversité est en crise, la déforestation se poursuit sans relâche, les peuples autochtones et les communautés locales voient quotidiennement leurs vies menacées. Les mouvements de la société civile doivent continuer à nous battre pour la reconnaissance internationale, nationale et locale des droits collectifs.

Les Amis de la Terre International luttent pour les droits collectifs et ont besoin de votre aide

Nous travaillons avec des alliés, des peuples autochtones et des communautés locales dans le monde entier pour faire de la mise en œuvre des droits collectifs une réalité quotidienne. Sans une mise en œuvre véritable des droits collectifs, des pratiques historiques telles que la gestion communautaire des forêts ou encore l’agroécologie ne peuvent contribuer à l’utilisation durable et à la conservation des forêts et de la biodiversité, ni bénéficier aux femmes, aux hommes et aux enfants qui habitent les territoires concernés. 

Nous luttons pour les droits collectifs et les droits des peuples autochtones et des communautés locales aux côtés de nos groupes membres et de nos alliés. Au niveau local, cela signifie exercer ces droits dans les territoires et sensibiliser les détenteurs de droits. Les Amis de la Terre participent également à des espaces internationaux tels que la Convention sur la diversité biologique, le  Mécanisme de la société civile et des peuples autochtones ou encore les négociations des Nations unies pour un traité contraignant sur les sociétés transnationales et les droits humains

L’exemple local de Porto Alegre est très inspirant. Le centre communautaire CaSanAT de Porto Alegre, au Brésil, lutte à la fois contre la faim, les effets de la pandémie de Covid19 et la répression du gouvernement Bolsonaro :

« Notre présence ici nous a permis de réclamer la mise en œuvre de politiques publiques et de montrer qu’il est possible de multiplier la durabilité et la culture pour des milliers de personnes ». Lúcia Ortiz, vice-présidente du conseil d’administration de CaSanAT et présidente des Amis de la Terre Brésil. 

Ce sont là nos voies vers un changement de système en faveur des droits collectifs.

Pour en savoir plus sur les droits collectifs :  

Suivez nos travaux sur  les forêts et la biodiversité, la justice de genre, la souveraineté alimentaire et la souveraineté énergétique

Renseignez vous sur notre Système de solidarité internationaliste et soutenez les luttes menées à travers le monde pour défendre les droits collectifs des peuples et les droits humains.