Un rapport révèle le rôle de la Banque mondiale dans le chaos climatique

BONN, ALLEMAGNE, 11 juin 2011 – Un nouveau rapport publié aujourd’hui par Les Amis de la Terre International à l’occasion des pourparlers sur le climat des Nations Unies à Bonn cette semaine montre que le Groupe de la Banque Mondiale accroît ses investissements dans les combustibles fossiles et fait la promotion, face au changement climatique, de fausses solutions menées par les entreprises, y compris l’échange de droits d’émission de carbone, qui ont pour effet d’aggraver la crise environnementale actuelle au lieu de l’atténuer.
Ce rapport, intitulé « Catalyser la catastrophe du changement climatique », fait suite à l’inquiétude de plus en plus répandue dans les pays en développement quant au rôle prépondérant de la Banque mondiale dans le financement climatique.
Le rapport montre comment le financement, de la part de la Banque, de combustibles fossiles polluants est en hausse, enfermant des pays comme l’Inde et l’Afrique du Sud dans une dépendance encore plus forte au charbon. En outre, la Banque pilote l’expansion des marchés du carbone, une trappe de secours pour les pays riches industrialisés leur permettant de ne pas réduire leurs émissions tout en causant des dommages environnementaux et le déplacement de communautés dans le Sud global. Malgré des retombées négatives sur l’environnement, la société et le changement climatique, la Banque mondiale augmente de façon significative son soutien à de grands projets d’énergie hydroélectrique.
Malgré des prêts octroyés à des projets non pérennes à travers le monde entier, la Banque cherche à jouer un rôle influent dans le Fonds climatique vert des Nations Unies et dans les mécanismes visant à réduire les émissions dues au déboisement et à la dégradation des forêts dans les pays en développement (REDD).
Sebastian Valdomir, coordinateur du Programme pour la Justice économique des Amis de la Terre International, explique :
« La Banque mondiale fait partie du problème climatique, pas de la solution. Ses conflits d’intérêt ainsi que des antécédents sociaux et environnementaux épouvantables devraient immédiatement la disqualifier d’un quelconque rôle dans la mise au point d’un Fonds climatique vert, et plus généralement du financement climatique. »
La Banque mondiale est taxée de conflit d’intérêt en ce qu’elle fait office à la fois d’administrateur suppléant au Fonds climatique vert (fonction fiduciaire) et de Groupe d’appui technique à la création du fonds (fonction de consultation). Dans les faits, la Banque mettrait ainsi au point un fonds censé superviser ses propres activités.
Les pratiques de prêt de la Banque mondiale pour les combustibles fossiles ainsi que la propagation de fausses solutions au changement climatique, comme l’échange de droits d’émission de carbone et les barrages de grande taille, doivent entraîner son exclusion de tout rôle dans la mise en œuvre du Fonds climatique vert de la Convention-cadre des nations Unies sur le changement climatique.
Les Amis de la Terre International demande un financement climatique issu de contributions budgétaires évaluées et d’autres sources innovantes distinctes des marchés – comme les taxes de transaction financière – qui soit proportionnel au rôle disproportionné des pays riches dans la création du problème du changement climatique.
Kate Horner, analyste politique pour Les Amis de la Terre International, souligne :
« La Banque mondiale prétend être le chef du file sur la question du changement climatique, mais comme le montre ce rapport, elle est un des plus grands bailleurs de fonds pour des projets utilisant les combustibles fossiles polluants, l’échange de droits d’émission du carbone et les méga barrages. De telles initiatives accroissent la pauvreté et nous mènent au bord d’un désastre environnemental à l’échelle mondiale. »
NOTES AUX EDITEURS
[1] Le rapport montre qu’en 2010, la Banque a atteint un nouveau record en matière de financement de combustibles fossiles, avec un total de 6,6 milliards de dollars, soit une augmentation de 116% par rapport à 2009. Sur ce total, 4,4 milliards de dollars ont été investis dans le charbon, établissant ainsi un autre record, et une augmentation de 356% par rapport à l’année précédente.
[2] L’IFC, l’institution privée de prêt de la Banque mondiale, a approuvé l’investissement de 450 millions de dollars pour la centrale Mundra au charbon de 4 000 MW de Tata dans le Gujarat en Inde, dont on estime qu’elle rejettera 25,7 millions de tonnes de CO2 par an pendant au moins 25 ans.
En avril 2010, la Banque mondiale a également approuvé un imposant prêt de 3,75 milliards de dollars, dont la majeure partie servira à financer la centrale au charbon de 4 800 MW de Medupi, construite par Eskom, la compagnie publique de production et de distribution d’électricité de l’Afrique du Sud. Ce prêt engendrera l’ouverture de 40 nouvelles mines de charbon pour alimenter la centrale de Medupi et les projets connexes. L’Afrique du Sud est actuellement responsable de 40% de toutes les émissions de gaz à effet de serre en Afrique, et ce prêt ne fera qu’ajouter à ces émissions.
[3] Depuis 2003, la Banque mondiale augmente ses investissements dans les grands projets d’énergie hydroélectrique, faisant suite à un ralentissement de tels investissements dans les années 1990, et ce bien que les barrages aient d’ores et déjà déplacé quelque 40 à 80 millions de personnes.
[4] Le Fonds d’investissement climatique de la Banque mondiale (FIC) inclut un Programme Pilote pour la Résilience Climatique (PPRC) qui autorise des prêts pour l’adaptation, contrairement au fonds de la CCNUCC et au Fonds d’adaptation, ce qui a récemment entraîné des manifestations au Népal et au Bangladesh.
[5] Les conclusions clés du rapport seront présentées lors d’un événement parallèle aux pourparlers sur le changement climatique de la CCNUCC à Bonn, en Allemagne le samedi 11 juin de 18H15 à 19H45 : WIND, Bâtiment du Ministère de l’environnement.
CONTACTS :
Sebastian Valdomir – Coordinateur international, Programme pour la Justice économique, Les Amis de la Terre International (espagnol et portugais, basé en Uruguay). Tel portable : +598 98 965 135, sebastien@redes.org
Kate Horner – Analyste politique sur la Justice climatique, Les Amis de la Terre US (anglais uniquement, disponible aux pourparlers de la CCNUCC à Bonn). Tel portable : +13 603 199 444, khorner@foe.org
Sarah-Jayne Clifton – Coordinatrice internationale, Programme Justice climatique et énergétique, Les Amis de la Terre International (anglais uniquement, basée au RU). Tel portable : +44 7912 406510, sarah.clifton@foe.co.uk