Mama Fikile Ntshangase web

Les Amis de la Terre International condamnent le meurtre de Mama Fikile Ntshangase, abattue chez elle à Mtubatuba, dans la province du KwaZulu-Natal, en Afrique du Sud. Aux côtés des Amis de la Terre Afrique et de GroundWork/Amis de la Terre Afrique du Sud, nous affirmons notre solidarité envers la communauté Somkhele et l’Organisation pour la justice environnementale de la communauté Mfolozi (MCEJO) dans leur lutte contre l’expansion de la mine de charbon de Tendele et pour la défense des droits humains.

Mama Fikile faisait partie de la communauté Somkhele, laquelle vit à proximité de la mine de charbon de Tendele ; celle-ci est la propriété de Tendele Coal Mining (Pty) Ltd, une filiale de Petmin. En tant que vice-présidente d’une sous-commission de l’Organisation pour la justice environnementale de la communauté Mfolozi (MCEJO), elle avait ouvertement exprimé ses craintes au sujet des activités de la mine de charbon. Elle n’était pas disposée à signer avec la société un accord visant à abandonner ses actions en justice relatives à leurs opérations actuelles et à leurs projets d’expansion, qui auraient pour conséquence de déplacer 21 familles de leurs terres ancestrales. En refusant le pot-de-vin offert par la société, elle aurait déclaré : « ’ai refusé de signer. Je ne vendrai pas mon peuple. Et s’il le faut, je mourrai pour mon peuple ». Dans la soirée du jeudi 22 octobre 2020, Mama Fikile a été froidement abattue chez elle par quatre hommes armés.

Les violations des droits humains contre les militants environnementaux et politiques et contre les défenseurs des territoires et des droits des peuples se multiplient dans toute l’Afrique.  Tandis que les populations souffrent des effets de la pandémie de Covid-19 ainsi que des restrictions qui l’accompagnent, les multinationales ont continué à étendre leurs activités minières, pétrolières et gazières sur le continent. Elles ne tiennent aucunement compte des demandes et des droits des populations locales, qui souffrent d’expulsions forcées, d’un accès restreint à leurs terres, d’assassinats et d’une aggravation des effets des changements climatiques, conséquence directe de l’exploitation des combustibles fossiles. Les États et les gouvernements censés protéger leurs populations sont de plus en plus dominés par l’influence des entreprises : dès lors, celles et ceux qui luttent pour défendre leurs droits et leurs territoires contre les projets d’extraction sont d’autant plus la cible d’intimidations, de meurtres, d’enlèvements et d’arrestations. Alors que les sociétés transnationales s’efforcent en permanence d’affaiblir la législation et sa mise en œuvre à l’échelle nationale,  les peuples  peinent à obtenir justice au travers des systèmes judiciaires nationaux et les entreprises continuent à agir en toute impunité.

Le 27 octobre 2020, GroundWork a adressé une lettre à différentes institutions d’Afrique du Sud, demandant de toute urgence une enquête rapide sur l’assassinat de Mama Fikile, afin de traduire les responsables en justice. Nous soutenons cette lettre. Nous demandons en outre à Cyril Ramaphosa, président de la République d’Afrique du Sud, ainsi qu’au ministre de la police, au commissaire provincial du KwaZulu Natal, au président du Comité de la police, au commissaire national du SAPS et au président de la Commission sud-africaine des droits humains de veiller à ce que les autorités chargées de l’application des lois mènent des enquêtes impartiales, rapides et approfondies sur tous les cas d’attaques et de harcèlement de défenseurs des droits des communautés locales. Nous exigeons la mise en œuvre d’un plan qui permette de remédier à l’absence d’enquêtes adéquates sur ces affaires. Nous dénonçons la criminalisation et les mauvais traitements subis parcelles et ceux qui exercent leur droit à la liberté d’expression, de réunion et de protestation. Nous demandons un instrument international contraignant qui impose une réglementation aux États, mettant ainsi fin à l’impunité des multinationales et des auteurs intellectuels de ces crimes.


Nous manifestons notre solidarité avec la famille de Mama Fikile ainsi qu’avec l’ensemble de la communauté de Somkhele et l’Organisation pour la justice environnementale de la communauté Mfolozi (MCEJO). Son combat est pour nous une source d’inspiration et nous n’oublierons pas son engagement pour son peuple et pour l’avènement d’une justice sociale et environnementale.


Les Amis de la Terre International et les Amis de la Terre Afrique


Références :


Communiqué de presse de groundWork : « Meurtre de Fikile Ntshangase, militante écologiste de Somkhele », octobre 2020.


Lettre de groundWork au Président sud-africain : « Demande d’une enquête rapide et de toute urgence et pour arrêter et juger les responsables du meurtre de Mama Fikile Ntshangase », octobre 2020.


Rapport du Centre pour les droits environnementaux : « ‘Nous savons que nos vies sont en danger’ : climat de peur au sein des populations d’Afrique du Sud touchées par l’exploitation minière », avril 2019